CAPITALISME OU KLEPTOCRATIE ?

Publié par Emanciper le

CAPITALISME OU KLEPTOCRATIE ?

Le point de vue de Gérard Volat, porte-parole du Collectif de réflexion « Brave Soldat Chveïk » (octobre 2022)

Modeste proposition

 

En 1942, dans son livre « Capitalisme, socialisme et démocratie »(1), Joseph Schumpeter, défenseur du capitalisme en prophétisait sa fin. Force est de constater qu’aujourd’hui, le capitalisme qu’on le qualifie de financier, de libéral, d’autoritaire, d’Etat, de connivence, s’est étendu sur toute la planète.

 

En France, nos dirigeants défendent ce système libéral où comme le souligne Thomas Porcher (2) « les cadeaux fiscaux en faveur des plus riches se multiplient au même rythme que les coupes budgétaires pour les plus pauvres ».

 

Chaque année,(3) c’est environ 158 Milliards d’euros d’aides publiques distribuées aux entreprises de notre pays qui sont prises dans la poche des contribuables, « un pognon de dingue ».

Avec des montants aussi astronomiques, personne ne peut nier que les entreprises soient véritablement assistées.

Ces 158 Milliards distribués par le gouvernement sont liés à plusieurs mécanismes via de nombreux dispositifs :

 

– des baisses d’impôts de production

– des baisses et des gels de cotisations sociales régulières depuis l’année 1979

– de l’optimisation fiscale

– des subventions

 

Evidemment, ce sont les 50 % les plus riches qui en profitent prioritairement. Ces 158 Milliards sont accordés sans aucune contrepartie, aucune contrainte avec simplement la promesse d’un ruissellement futur qui se fait  toujours attendre.

 

Si l’on peut admettre que l’on puisse aider des petites et moyennes entreprises, cela devient incompréhensible s’agissant de grosses entreprises versant des dividendes à leurs actionnaires et des salaires indécents à leurs dirigeants.

 

Et c’est là que le bât blesse et que l’idée germe. Ces 158 Milliards, en toute logique devraient se traduire par autant d’actions en faveur des contribuables. Au moment de la distribution des dividendes, les citoyens actionnaires récupéreraient des sommes considérables qui pourraient être fléchées sur les services publics.

Prenons un exemple : si j’achète pour 10 000 euros d’actions Total ou Sanofi, je participe en qualité d’actionnaire privé à la distribution des dividendes alors qu’en tant que simple contribuable, je n’ai droit à rien alors que j’ai pourtant financé via mes impôts ces mêmes entreprises. Il y a incohérence. On aura compris avec cette idée simple mais neuve, jamais lue ou entendue dans les médias ou dans la bouche de nos « Mozart » de l’économie, que depuis 50 ans, ce sont des Milliards d’euros qui sont volés aux contribuables.

Nous sommes, collectivement, spoliés. Ce n’est plus du capitalisme mais de la pure prédation protégée par les lois de la république et nos gouvernements successifs.Il est toujours étonnant d’entendre les théoriciens du libéralisme, ces ardents défenseurs de l’entreprise privée, n’avoir de cesse de réclamer des financements publics même quand tout va bien pour leur bourse.

 

Le capitalisme, ce système économique fondé sur la propriété privée des moyens de production et sur l’accumulation des richesses obtenues est très friande de l’argent public, la recherche du profit n’ayant pas besoin d’éthique et supportant cette contradiction pourtant insurmontable. « Tout fait ventre ».

 

Selon l’analyse marxiste, le capitalisme est un système pervers puisque les propriétaires du « capital » s’enrichissent au détriment des travailleurs qui vendent leur force de travail sans participer aux bénéfices de l’entreprise. Et dans notre propos, le capitalisme est doublement gagnant puisque les travailleurs et la population en général, passent à la caisse une deuxième fois en subventionnant le « capital » après avoir, d’ailleurs, consommé toujours plus de produits à l’obsolescence programmée dans une aliénation consumériste entretenue par la publicité omniprésente.

 

Plus généralement, afin de cesser de socialiser les pertes et de privatiser les profits, dans un pays gouverné par les intérêts privés dans une logique clanique où la souveraineté du peuple est bafouée, nous disons aux zélateurs de l’idéologie capitaliste : soyez cohérents et payez les actionnaires citoyens qui ont investi par milliards dans vos entreprises. Afin d’éviter l’accusation d’Etatisme, les milliards de dividendes générés chaque année et fléchés vers les services publics seraient gérés par des collectifs citoyens contrôlés et non par le gouvernement. La pauvreté serait supprimée, le système de santé et des services publics rétablis. Au final, une croissance, celle du bien être social et écologique à portée de portefeuilles d’actions. Cette idée neuve est à creuser, à affiner, à étudier dans les détails mais sa pertinence ne peut être ignorée. Nous pourrions en faire une proposition de loi. Alors utopie ? Certes, mais comme le disait Théodore Monod « l’utopie est un rêve non encore réalisé ».

 

 

(1) Capitalisme, socialisme et démocratie, Joseph Schumpeter,  éditions Payot & Rivages,1990

(2) Les Délaissés,Thomas Porcher, 4ième de couverture, Librairie Arthème Fayard, 2020. Thomas Porcher est membre du collectif des économistes atterrés.

(3) chiffres pour 2021, La CGT cite pour 2016 le chiffre d’environ 200 Milliards.